« Pseudo psy » ou comment s’y retrouver, à qui s’adresser lorsqu’on traverse une phase de souffrance aiguë ?
La France est un pays de droit. Les titres sont protégés en particulier dans le domaine de la santé où les risques sont grands quant aux dérapages sectaires et autres usurpations de compétences. En dépit de toute publicité
et autres apparences de bienveillance et de générosité, le fait de mettre « Psycho » devant une activité, ou « thérapeute » après, ne garantit d’aucune compétence universitaire. Musicothérapeute, réfléxothérapeute, coach, tangothérapeute, lithothérapie, équithérapie… tous les abus sont possibles. De nombreuses activités peuvent soulager la souffrance psychique. Le rapport humain peut à lui seul, parfois apaiser certains maux. Des activités peuvent apporter un soutien ponctuel dans un premier temps puis ensuite, une aggravation de l’état psychique. Il est possible de soutenir certaines personnes à travers des activités sociales ou occupationnelles qui peuvent réellement permettre la remise en mouvement et favoriser des mécanismes réparateurs, comme cela se pratique dans les CATTP ou certains lieux de soins : Le sport, l’Art dans toutes sa diversité, la danse, l’écriture, la musique, la peinture… le contact avec la nature, le jardinage, les animaux, les chevaux, les dauphins…
Mais en tout état de cause, si ces activités peuvent être encadrées par des professionnels de leur discipline, ces derniers ne peuvent se réclamer d’une compétence thérapeutique qu’après avoir acquis une solide connaissance théorico-clinique universitaire, ainsi que les diplômes d’État validant ces mêmes connaissances.
Certains Coachs proposant la motivation, le « bonheur » et « l’équilibre », le développement personnel, magnétiseur, médium, voyant, coach-comédien…enseignants spécialisés, « coach en stratégies d’apprentissage », ces titres ne sont pas protégés, ne nécessitent aucune formation et ne reflètent que des auto-proclamations personnelles. Même s’il s’agit parfois de véritables compétences spécifiques, tout le monde peut porter un titre évocateur et proposer des services sans plus de justification qu’un sourire ou le diplôme d’une école elle-même auto proclamée. Les coachs n’ont en tout état de cause, aucune formation en psychologie, en psychopathologie ou en technique psychothérapique.
Toutes ces activités de services répondent souvent à une méconnaissance du parcours de santé et à une grande détresse du public, à un besoin de soulagement rapide (en réponse à une mythologie de la thérapie longue et coûteuse) et à une complexité des métiers du soin. Ces approches se fondent aussi souvent sur une vulgarisation, un détournement et une simplification de concepts complexes de la psychologie clinique dont la manipulation peut engendrer des troubles chez les personnes vulnérables, non seulement en les hystérisant, mais en les incitant à « l’agir » et au « passage à l’acte », ce qui débouche sur des situations plus complexes encore à traiter. Le véritable danger est que ces activités détournent les personnes vulnérables des professionnels de santé formés à la psychologie clinique.
Aujourd’hui, la validation des acquis par un diplôme universitaire, d’une école certifiée et la pratique de la clinique lors de stages en milieu institutionnel est une formation, sinon suffisante, au moins nécessaire.
La psychiatrie moderne s’est structurée autour de l’héritage militaire qui visait en particulier la prise en charge des « gueules cassées » à travers divers traitements, chirurgicaux, physico-chimiques, électriques, et autres expériences comportementales. Dans le même temps, d’autres approches thérapeutiques issues de la philosophie, de la littérature et de la politique font leur apparition. La psychologie est traversée par de nombreux courants, s’émancipe de la médecine et de la psychiatrie qui demeurent liées au pouvoir et à l’inscription militaire dont elle est issue (Favez-Boutonnier, Lagache…). Pour autant, de nombreux liens se sont structurés avec le temps, entre les différentes approches. Mais à l’instar de la médecine, la psychologie s’est construite sur des savoirs établis et stabilisés, et de façon dynamique.
Le psychiatre est un médecin. Il est formé au fonctionnement somatique et aux déséquilibres neurophysiologiques. Le psychiatre est un spécialiste. Son titre est protégé et il peut prescrire des médicaments. Il n’est pas formé à la psychologie ni à d’autres approches issues de la psychologie. Il s’en réfère au vocabulaire (la nosographie) psychiatrique, parfois au DSM IV qui régente la désignation des maladies psychiques au gré des découvertes de l’industrie pharmaceutique, mais aussi, de la recherche médicale fondamentale.
Ces découvertes sont complémentaires de celles de la psychologie et de la psychopathologie. Il existe un véritable dialogue entre les compétences du médecin et celles du psychologue, et c’est même à travers ce dialogue que se noue le soin. Certains psychiatres s’opposent à la classification du DSM. C’est un débat très actif et politique, surtout en France. La consultation chez un psychiatre est prise en charge par la Sécurité Sociale selon diverses conditions. Le psychiatre médecin peut en outre, se revendiquer psychanalyste mais aucun diplôme ne peut dans ce domaine attester de sa formation.
Le psychologue clinicien est un professionnel de santé diplômé dont le titre est protégé. Il aura étudié la psychologie et les bases de la neurobiologie ainsi que la génétique afin d’asseoir sa clinique. Ce titre est obtenu après un Master 2 en Psychologie (l’ancien DESS), soit cinq années d’études minimum. Le clinicien est référencé auprès du Ministère de la Santé à travers un numéro professionnel ADELI. Il suppose la maîtrise de différentes approches de prises en charge de la souffrance psychique, ainsi qu’une connaissance du fonctionnement neurobiologique du cerveau et de la nosographie s’y référant, ce qui lui permet de s’inscrire dans le parcours de santé et de dialoguer avec les médecins dans le cadre de la prise en charge globale d’un patient. Pour en savoir plus, cliquez ici vers le site du Ministère.
Le psychologue clinicien est à même d’orienter la personne et à la fois de prendre en charge la souffrance psychique dans le cadre d’une thérapie. Selon les courants, les écoles et les universités, en dehors de ce socle commun, le clinicien peut s’orienter vers des approches comportementales, sociales, psychanalytiques, psychodynamiques… mais le diplôme de psychologue clinicien comporte aussi un bloc d’environ mille heures d’expérience en Institution psychiatrique ou psychothérapique, au contact des patients et des autres professionnels de santé. On croise le psychologue clinicien à l’hôpital, en CMP, CMPP, ESAT, CATTP… En institution, le psychologue est remboursé par la Sécurité Sociale sous quelques conditions. En cabinet privé, il peut être pris en charge par certaines mutuelles.
L’obtention d’un diplôme de clinicien protège de certaines dérives et assure au patient une ouverture et une connaissance globale des techniques et des approches tant théorico-cliniques que médicales. Elle garantit une inscription dans un parcours de santé global, y compris lorsqu’on est d’orientation psychanalytique, en partie grâce aux nombreuses heures d’immersion dans les institutions, en stage obligatoire. Cette expérience confronte le futur praticien à la réalité de terrain. C’est une étape indispensable, particulièrement formatrice du parcours de clinicien, tant par la connaissance qu’elle procure que par la position d’élève, de disciple et de béotien qu’elle implique de la part du futur psychologue.
Le psychanalyste est un thérapeute à l’écoute des mécanismes inconscients. Pour faire court, il se réfère à des modèles de l’appareil psychique comme le font les médecins pour le corps. Cette science psychanalytique est aussi une méthode : la psychanalyse. Ce titre n’est pas protégé. On peut se déclarer soi-même psychanalyste sans autre validation d’acquis. De ce fait, cette situation peut donner lieu à toutes sortes de dérives et le patient doit s’entourer d’un certain nombre de précautions quant au choix de son analyste, en particulier, le choisir parmi les psychologues diplômés d’orientation psychanalytique, mais cette connaissance est aussi transmise historiquement par des associations de psychanalystes, il est donc important de vérifier si ce dernier est auteur d’ouvrages institutionnels (auprès d’éditeurs reconnus), ou qu’il rédige des articles en tant qu’analyste dans des revues universitaires du même ordre.
La psychanalyse est une branche de la psychologie clinique. Elle s’en émancipe par de nombreux aspects et peut même s’y opposer, en particulier lorsqu’on la confronte aux méthodes de psychologie cognitivo-comportementale (T.C.C)…
Le suivi d’une analyse personnelle est une condition minimale à la bonne pratique de cette activité de psychanalyste, mais rien ne peut en attester et, bien que nécessaire, cela ne constitue pas une garantie quant aux compétences du praticien. Il est donc souhaitable, en outre, d’être détenteur d’un diplôme de Psychologue Clinicien pour la pratiquer. Malgré tout, certaines associations de psychanalystes et écoles prodiguent d’excellentes formations, parfois bien plus pointues que celles dispensées à l’université (comme l’EPHEP), mais ne débouchant pas sur le titre de psychologue car ne remplissant pas les conditions nécessaires à l’obtention de ce titre et avant tout, ces formations sont focalisées sur une seule approche, voire même un courant de cette approche, souvent revendiqué…
Au fil des années, la législation aura évolué et certains psychanalystes de renom qui officièrent à partir des années 70′, souvent eux-mêmes analysants de Lacan, Pontalis, Klein, Dolto… n’auront jamais été psychologues mais écrivains, philosophes ou penseurs. Ils ont même parfois fondé des mouvements psychanalytiques… Mais les temps ont changé, aujourd’hui, rares sont les psychanalystes qui ne soient psychologues cliniciens, parfois psychiatres. Afin de se prémunir contre toutes dérives publicitaires, commerciales ou sectaires, le législateur aura pris soin de protéger le patient par ces dispositifs diplômants.
De nouveaux pseudo psychanalystes auto-proclamés, gourous et autres donneurs de conseils font florès sur FaceBook, sur Youtube ainsi que sur les réseaux sociaux. Il convient d’être très prudent lorsque la validation universitaire est absente. Le charabia pseudo-psychologique est d’usage chez les journalistes et dans les médias et il est difficile pour une personne dans la souffrance, de s’y retrouver…
Ce qui pose alors un autre débat récurrent, plus politique celui-là. Le psychiatre n’étant pas formé à la psychologie, comment peut-il prendre en charge des patients sur le long terme ou faire état d’un titre de psychanalyste ? Il peut bien sûr faire partie d’une association, mais comment connaître ses compétences dans un domaine qui réclame une position très différente, voire opposée à l’approche médicale ? Et qu’en est-il du remboursement ? n’est-ce pas l’occasion de certaines dérives ?
Toute la question repose sur le choix d’approches théoriques et l’articulation entre les différents domaines de compétences. L’obtention d’un diplôme universitaire ne garantit jamais le niveau de qualité du praticien, c’est vrai dans tous les domaines, mais elle assure la capacité d’inscription de ce que les psychanalystes appellent « la fonction symbolique », c’est-à-dire, pour faire court, une inscription dans une lignée, la possibilité de se plier à certaines règles, au respect d’une déontologie, d’une épistémologie et d’une éthique, la connaissance d’une ou de plusieurs nosographies (un vocabulaire) commune et la maîtrise d’un savoir stabilisé.
Le titre de psychologue est simple : Psychologue (Clinicien), Diplômé de l’Université XXX, (ou de certaines écoles spécifiques comme Psycho-Prat par exemple) et disposant d’un No de santé ADELI. Il n’en existe pas d’autre.
Il n’y a pas de « psy certifiés » (c’est un annuaire commercial permettant de forcer certains professionnels, non diplômés, à payer pour se faire connaitre). De même que la publication d’un ouvrage à base de techniques et de solutions miracles n’atteste en rien d’une compétence… surtout lorsqu’il semble vous vendre la panacée.
Il n’y a pas de solution miracle justement, seulement des processus thérapeutiques réclamant des compétences et un travail adapté à chaque sujet, son histoire, son parcours…
Les indices d’une pratique douteuse sont souvent :
– Une proximité physique avec le patient sous prétexte de soutien,
– l’isolement du praticien dans le parcours de santé
– son absence de qualifications officielles inscrites sur les sites ministériels
– la revendication de méthodes « rapides », « courtes », d’une « bienveillance » (comme si le fait de l’affirmer n’était déjà pas l’indice d’une pernicieuse manipulation)
– l’accumulation de titres sans valeur universitaire et l’amalgame volontaire entre activité occupationnelle et psychothérapie
– les pseudo-diplômes d’écoles ou d’associations (Par exemple : …diplômé ‘par’ ‘un centre de psychologie appliquée’…) le recours à des techniques ésotériques comme le tarot, la numérologie, parfois certaines médecines parallèles, l’invention de néologismes (tangothérapie, divinothérapie, art-thérapie exercé sans qualification de thérapeute…).
– L’incapacité à se référer à l’un des diagnostics de références internationales (on peut utiliser une nosographie DSM, mais aussi le Pontalis, le Henri Hey…) et de prendre attache avec le médecin traitant, de comprendre les effets des psychotropes courants et leur classification sur le psychisme.